Suivons donc les chemins du Christ, ceux qu'il nous a montrés, surtout le chemin d'humilité…
« Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu »
Dimanche 22 octobre 2017 Journée des missions.
« Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu »
Voilà une phrase d’Evangile souvent citée de nos jours (appliquée à la loi qui doit régir nos comportements, alors que dans le texte elle concerne simplement le paiement de l’impôt) Cette phrase est utilisée tantôt par des personnes qui veulent obtenir de tout citoyen un comportement formaté par les principes républicains, tantôt par des croyants qui veulent séparer leurs attitudes de ces mêmes principes …. Chacun trouvant là un moyen de soutenir ses idées.
Resituons la parole de Jésus dans son contexte : Le peuple Hébreu s’est soudé, s’est constitué autour de la loi de Moïse à sa sortie de l’esclavage en Egypte. Cette loi était, et est toujours, considérée comme une loi divine, dictée à Moïse par Dieu lui même. Les commandements de Moïse se sont appliqués à tous les membres de ce peuple, car tous les hébreux étaient censés avoir la religion juive. Cette loi mélange naturellement les devoirs sociaux avec les prescriptions religieuses, par exemple : « tu ne tueras pas et …..Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton esprit et de toute ta force » Ces deux commandements font partie à égale valeur, des fameux Dix commandements appris dans la Bible de notre enfance, décalogue qui résume et simplifie beaucoup trop les très nombreuses lois qui régissent ce peule hébreu, lois ajoutées et complétées, amandées au fil des siècles comme tout code pénal, au point parfois de contourner les principes fondamentaux … Aujourd’hui, dans notre civilisation on ne peut pas invoquer la loi au nom d’un Dieu auquel beaucoup de citoyens ne font pas allégeance . Par exemple, dans la loi on ne pourrait pas trouver à la fois : « Tout conducteur d’une voiture doit posséder le permis « et « Chaque enfant devra être baptisé dans les 6 premiers mois après sa naissance »…
A l’époque du Christ il se passe un bouleversement terrible pour les hébreux avec l’occupation des envahisseurs romains : Ceux-ci imposent les coutumes, les meurs, la monnaie et la loi de Rome, et ils font appliquer tout cela par la force. Cette loi contredit parfois la loi de Moïse : Ce n’est plus Dieu qui commande, c’est un empereur, étranger, païen, qui donne ses ordres, même s’ils contredisent les commandements de l’ancienne loi.. ;. On en a un exemple au moment du jugement de Jésus : Les grands prêtres affirment : « Nous avons une loi et d’après cette loi il doit mourir car il a prétendu être le Fils de Dieu » mais, devant Pilate ils doivent ajouter : « nous n’avons pas le droit de condamner quelqu’un à mort » Cette loi sépare complètement le pouvoir divin, la loi divine de la loi civile. C’est la même loi à Jérusalem, comme à Rome, c’est la loi de l’empire. Ce n’est pas comme avant, ce n’est pas Dieu qui demande, c’est un homme qui commande, … Les juifs, tous les juifs sont donc obligés de payer l’impôt à Rome… Ceux qui interpellent Jésus savent bien que ce n’est pas une question de permis ou de défendu : c’est obligatoire. Nous ne dirons rien de leur façon cajoleuse et mielleuse de poser leur question à Jésus qui est loin d’être naïf et qui les traite d’hypocrites… Mais jésus pose une question qui n’est pas anodine : « De qui est l’effigie gravée sur la pièce ? » Elle est de César que l’on doit vénérer comme un demi-Dieu et à qui on doit se soumettre avec le même état d’esprit que dans la religion, à qui on doit rendre un culte. A cause de cette exigence, beaucoup de Chrétiens mourront plutôt que de rendre un culte à l’empereur. César remplace Dieu et il exige de se sujets une vénération. Et là, Jésus sépare les pouvoirs : A césar ce qui est à l’état, et à Dieu ce qui revient à Dieu. Implicitement il invite à respecter le pouvoir en place, il n’est pas un politique, pas un révolutionnaire mais il ne rend pas un culte à l’empereur, culte réservé à Dieu seul.
Concrètement cette position va impacter le comportement des premiers chrétiens : Quand ils étaient tous sur le territoire d’Israël, où, presque tous étaient juifs, ils pouvaient imposer la loi de Moïse à tous les habitants, mais maintenant qu’ils sont dispersés ils ne peuvent plus imposer cette règle et doivent se soumettre à la loi du pays dans lequel ils habitent. Même s’ils deviennent très nombreux et majoritaires dans un pays, auraient ils le droit d’imposer une loi divine à l’ensemble des habitants, ne devraient ils pas tenir compte et des autres religions et des gens qui n’ont pas la foi ? Quand des gens qui vivent avec une loi religieuse, la scharia par exemple, vont habiter dans un pays laïque, peuvent ils se mettre à part des lois de ce pays ? Peuvent-ils continuer à vivre leurs lois et leurs coutumes indépendamment des lois du pays d’accueil ? Par exemple, si la polygamie, ou l’excision sont autorisées par leur religion peuvent ils la pratiquer dans un pays où la loi l’interdit ? Et bien d’autres exemples que vous saurez trouver…Pour les Chrétiens c’est la même chose, ils ne doivent pas imposer leurs principes religieux à ceux qui ne partagent pas leurs convictions : A César ce qui est à César, à Dieu ce qui est à Dieu »… Ce qui ne les empêche pas , bien au contraire, de participer à la vie publique pour influencer les décisions et à manifester leur désaccord quand des valeurs qu’ils estiment fondamentales sont remises en cause … Et puis il y a des lois qui permettent des comportements, mais qui ne les imposent pas, ce sont souvent les lois dites sociétales : Elles concernent le mariage, la bioéthique, la fin de vie,etc etc … elles permettent, elles n’imposent pas … Les chrétiens sauront garder leur réflexion chrétienne et leur libre arbitre face à ces questions : A Dieu ce qui est à Dieu. Ainsi les premiers Chrétiens se singularisaient en n’allant jamais au cirque parce que la vie n’y était pas respectée, alors que la loi le permettait … Aujourd’hui des chrétiens font des choix de vie différents des non croyants, tout en respectant les lois de la république… ;
Cette question mériterait beaucoup plus de temps, d’explications, de nuances, et aborderait d’autres aspects qu’il est difficile d’aborder dans une homélie du dimanche matin, mais donner « à Dieu ce qui est à Dieu » n’est ce pas une invitation à se réunir pour parler ensemble de cette invitation de Jésus à faire des choix de liberté ? Que devons nous rendre à Dieu ce qui est à Dieu ? »
Je voudrais conclure avec un texte d’hier au soir, ou plutôt de plus de 1800 ans, c’est un texte écrit à l’autorité du moment par un chrétien d’Alexandrie ….Texte souvent appelé : l’épitre à Diognète : « Les chrétiens ne sont pas différents des autres hommes. Ils ne parlent pas un langage à eux. La vie qu’ils mènent, c’est la vie de tout le monde, pour s’habiller, pour manger … Ce sont des hommes et des femmes, mais ils ne vivent pas n’importe comment. Ils vivent sur la terre mais ils sont citoyens du ciel. Ils obéissent aux lois, mais leur façon de vivre est plus parfaite que les lois. Ils aiment tous les hommes et pourtant on les fait beaucoup souffrir. On n’en connait pas leurs coutumes, mais on les condamne. On les tue et ils gagnent la vraie vie… »
Seigneur garde nous citoyens honnêtes, libres, dignes, respectueux des lois et des institutions, présents et acteurs dans la société qui est la notre, mais garde nous chrétiens dans nos jugements, pratiquants de l’Evangile, soucieux qu’il rayonne sur le monde car il est chemin de bonheur et de fraternité. Amen.