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11 Novembre 2017 – Laudato si

Très souvent on entend dire que nous ne pouvons rien à la violence du monde, que la paix ne dépend pas de nous etc etc… Un grand auteur connu a comparé la vie du monde à un train qui fonce dans la campagne, avec différentes sortes de voyageurs dans les wagons et nous sommes peut être l’un ou l’autre voyageur a bord de ce train… ; Le train va très vite, les paysages succèdent aux paysages, et, de plus en plus souvent, il traverse les gares sans s’arrêter, laissant sur le quai des voyageurs qui auraient bien aimé monter mais qui sont oubliés par l’énorme machine ….

Dans ce train un homme s’inquiète… C’est vous, c’est moi, je ne sais pas, mais il a été embarqué dans ce train il y a un certain nombre d’années et il s’interroge parfois sur la destination de ce train où ses parents l’ont installé sans lui demander son avis : Où va ce train, quel est son terminus ? Qui est aux commandes ? Comment se fait il que des gens, de plus en plus nombreux soient laissés en rade, le train va de plus en plus vite…. Notre voyageur s’approche d’un premier passager et tente de partager avec lui ses questions. Mais celui-ci  a sombré dans un profond sommeil et le grognement qu’il donne en réponse n’engage pas à le déranger… Le voyageur, mon alter-égo, s’adresse à un autre personnage qui voyage le nez collé à la portière du wagon. Celui-ci est monté dans le train pour contempler le paysage, pour profiter du voyage, mais comme le train va de plus en plus vite, le paysage n’est plus accessible, le voyage n’a plus d’intérêt, alors il ouvre la portière et saute dans le vide… Dans un compartiment voisin il y a un troisième personnage qui s’affaire devant son ordinateur, les schémas succèdent aux courbes, les calculs succèdent aux graphiques : il essaie de concevoir un train qui ira encore bien plus vite que celui là… Mon alter-égo essaie de lui poser des questions : mais où va-t-on ? Pourquoi aller si vite en laissant tant de gens au bord de la voie ? Qui conduit ce train et y a-t-il au moins un pilote aux commandes ? Mais le scientifique n’a pas le temps de répondre, il faut aller plus vite et comment faire est sa seule question… Et le train va de plus en plus vite, peut être vers une issue fatale, peut être vers un chaos… Ne sachant plus à qui s’adresser pour poser ses questions le voyageur s’approche doucement du poste de pilotage et commence à regarder les manettes, tout en gardant bien en tête ses questions fondamentales : où allons nous , quel est le but du voyage ? Comment y allons-nous, tout seul où avec les autres ? Comment redonner sens à ce voyage ? et d’autres questions que nous nous sommes tous posés un jour où l’autre…. A moins que nous soyons le dormeur du train, passager insensible d’une expédition  dont nous ne maitrisons ni l’origine, ni le terme, ni le parcours ?

Il serait peut être temps de nous réveiller !  Nous connaissons tous des gens qui sautent du train : cela s’appelle le suicide, ou la drogue, ou l’alcool ou ce que Pascal appelait « le divertissement », cet ensemble de choses qui évite de se poser des questions. Nous connaissons forcément des techniciens, des savants qui nous entrainent vers des progrès qui nous dépassent : celui qui a inventé la fission nucléaire n’avait sans doute pas prévu les drames qui ont suivi ses découvertes, pas plus que l’arrogance de ceux qui parlent de ce qui pourrait menacer tel ou tel pays qui joue de son coté avec ses missiles à longue ou moyenne portée  et dont ce sont peut être simplement les neurones qui sont à portée limitée… Celui qui s’aventure dans les manipulations génétiques ne doit jamais oublier qu’il n’est pas le maitre de la vie et qu’on ne peut progresser sans faire passer l’éthique avant la génétique, celui qui invente un produit qui , en voulant faciliter l’éradication des mauvaises herbes, modifie la nature et met en péril la vie des consommateurs doit remettre en cause l’utilité de sa découverte. A force de modifier des éléments, même les paysages deviennent insipides et déserts, on parle de dérèglement climatique et les gens qui restent en rade des progrès de quelques uns sont de plus en plus nombreux…  Et les exemples sont nombreux…

Comment prendre en main les manettes ? Sur cette dernière question le pape François a écrit  une encyclique « Laudato si », un texte simple, clair qui montre à la fois les risques que nous courrons et les conséquences sur ce qu’il appelle « notre maison commune » et sur les plus pauvres habitants de cette maison, il parle des migrants que cela génère et des violences qui ont lieu ou qui se préparent, des conséquences  pour la paix, finalement… Il ne donne pas des solutions miracles, mais il suscite des comportements individuels et collectifs pour que ce train aille sans doute un peu moins vite mais qu’il évite la catastrophe ou les catastrophes… Tout le monde ne partage pas sa vision du terminus du voyage, tout le monde ne partage pas son enseignement sur la création et sur le créateur, tout le monde ne partage pas la vision de l’homme et le salut qui lui est offert, mais beaucoup, vraiment beaucoup, croyants ou non croyants, trouvent là une analyse de la vie du monde et de son avenir…

Alors sans chercher des solutions au-delà de nos capacités individuelles, chacun est invité aux gestes quotidiens qui respectent la nature, aux comportements citoyens , au non-gaspillage, à la limitation des excès dans tous les domaines, et aussi au partage, à l’accueil de ceux que le train a tendance à laisser en rade, à tous ces petits gestes quotidiens qui font que chacun pense à tous, avant de penser à soi tout seul, parce que, que nous soyons croyants ou non, nous ne sommes tous finalement que des voyageurs de passage….

P. J. Valentin